« Moi aussi, j’ai une fée chez moi
Et sa traîne est brûlée
Elle doit bien savoir qu’elle ne peut pas
Ne pourra jamais plus voler »

« La fée » de Zaz

Cette chanson m’a toujours fait penser à ma grand-mère. Elle était ma fée, la bienfaisante.

J’avais un lien extraordinaire avec elle, tant elle était généreuse, délicate, discrète aussi. Jamais je ne l’aie entendue se plaindre. Elle était mon repère.

Elle dédiait tellement sa vie aux autres que j’ai pu avoir l’impression qu’elle s’excusait de vivre parfois.

Un jour, bien après sa mort, je l’ai regardée autrement. Je l’ai regardée non pas comme la grand-mère, mais comme la femme. J’ai alors compris qu’elle ne s’était pas totalement accomplie.

Comme beaucoup de femmes de son époque, elle vivait dans l’ombre de sa puissance. Exprimer son potentiel ne faisait pas partie de ses perspectives. 

Il me semble qu’avec le recul, c’était un regret pour elle.

Bien sûr, elle ne l’a jamais dit, elle était bien trop pudique et respectueuse de son système pour ça. 

Alors que de mon côté, j’œuvrais pour faire grandir mon entreprise, en pensant à elle, j’ai réalisé la chance que j’avais de pouvoir le faire, de vivre à mon époque.

Elle n’avait pas pu. Elle était pourtant brillante, digne fille de sa mère, qui était la première femme du département à avoir obtenu un certificat d’études.

Oui mais voilà, la guerre est arrivée. Elle a travaillé pour subvenir aux besoins de sa mère puis de sa propre famille plutôt que de s’épanouir professionnellement.

S’épanouir professionnellement, un concept méconnu à l’époque.

Ça n’était pas une injonction ou une quête comme c’est le cas aujourd’hui.

Avec ce billet, je veux lui rendre hommage, la remercier pour tout ce qu’elle m’a transmis, sa force, son calme, son empathie et pour l’abnégation dont elle a fait preuve, cadeau à son mari et ses deux filles.

C’est une motivation de plus pour moi.

Comme dit mon fils, « Raison de plus » pour réaliser mes rêves. Pour elle et pour moi.

A Madeleine, ma fée aux ailes cassées, pour la vie !

Voilà qui est dit.


© Zaz / © Raphaël